lundi 12 septembre 2011

Perpignan Brest

Etape 6

Ce matin avant de partir je me mets de la pommade sur les cervicales, qui sont douloureuses ; je prends aussi un anti-inflammatoire car hier en me couchant j’ai ressenti une douleur au tendon. Avant de m’endormir je regarde de près ma route ; l’épisode de Perpignan avec mon arrivée par une pénétrante interdite aux vélos m’a échaudé. J’ai un sérieux doute pour prendre la D 6113 et ensuite la D 813, je décide de faire un détour par Salles sur l’Hers et St Michel de Lanés. En arrivant à Gardouch, je croise un cycliste qui prend un petit chemin qui longe un canal, je fais comme lui. Il me dit que par là je rejoins la périphérie de Toulouse, quand je lui demande comment s’appelle le canal, il me répond le « canal du midi ». C’est magnifique, calme, les seuls engins que je croise sont des vélos. Je profite pour regarder le paysage : devant une écluse, il y a des péniches, je ne peux pas poursuivre sans les avoir prises en photo.

Puis c’est moi-même que je photographie : quelle tête j’ai ! Je reprends mon petit bonhomme de chemin. En arrivant effectivement près de Toulouse, je continue sur ma route initiale, j’arrive à Blagnac, où je m’arrête dans une boulangerie m’acheter une banette ; sur la place je savoure mon pain, car cet après midi je risque fort de ne rien trouver d’ouvert. Je rencontre des difficultés à suivre ma route en raison des travaux pour la construction d’une ligne de tramway. Un cycliste me rejoint ; nous parlons de mes pancartes puis je lui demande la route pour Grenade. Il se propose de me servir de guide ce que j’accepte bien volontiers ; quelle sottise ! pour le suivre, je dois appuyer un peu plus sur mes pédales ; quand il me laisse seul sur la bonne route, je ressens une douleur au genou gauche. Elle sera ma compagne durant le reste de ma diagonale ; en plus mon tendon se réveille aussi. Je dois réduire mon allure pour calmer tout cela. Sous le panneau de Grenade, je pose mon vélo pour la traditionnelle photo.
Je double mon contrôle en pointant chez une fleuriste de l’autre côté de la route ; il y a un banc sur lequel je m’assieds. Au téléphone, j'explique à mon épouse les différents évènements, je lui parle aussi de mes douleurs ; elle m’invite à plus de prudence à l’avenir, mon fils me conseille de faire des étirements, m'engage également à la prudence et me souhaite du courage. Je reprends doucement la route mais à Verdun sur Garonne je dois à nouveau m’arrêter, mon genou est douloureux, je décide de mettre la pommade que j’ai achetée à Perpignan et je prends aussi un cachet ; j’attends entre dix et quinze minutes puis je repars. Est-ce l’effet de la pommade ou du cachet, mais cela va mieux, je peux rejoindre Castelsarrasin. Je fais également la rencontre de dizaines d’abeilles, de guêpes, enfin d’insectes qui bourdonnent, en passant devant un vignoble. Plus j’avance, plus je me rapproche de ma hantise, car après Moissac, je pars à la rencontre des pentes avant Lauzerte, je sais que je ne suis pas au bout des difficultés qui continuent vers Montaigu sur Quercy, ce sont des pentes à plus de 12% par endroit et c’est ainsi sur plus de 16 km. Pour rejoindre Tournon d’Agenais, le profil est identique, je suis en train de ruiner mon capital d’endurance, la portion qui va me conduire à Monflanquin n’est pas meilleure, mais j’avance.
Je téléphone à mon épouse, « je suis cramé, j’en ai marre de cette route, je suis au bout du rouleau ». Elle me conseille de bien me reposer, mais je suis condamné à pédaler sinon les carottes sont cuites ; toutefois, je prends le temps de mettre de la pommade sur mon genou et mes cervicales. Comme j’aimerais que le profil de la route s’adoucisse un peu, mais entre le rêve et la réalité il y a un monde. En allant vers Villareal les choses ne s’améliorent pas, au contraire. Dans le centre ville, je trouve une place où je vais pouvoir me préparer pour la nuit ; auparavant je cherche une maison pour demander de l’eau, je dérange une personne âgée pendant son repas, je m’excuse, elle accepte bien sûr, sans avoir au préalable proposé de mettre du vin. Je la remercie, mais l’eau me va très bien, sinon la route risque d’être encore plus chaotique. Je quitte ma bienfaitrice, mais cette question lancinante : « jusqu’où vais-je pouvoir aller ? » me taraude l’esprit. Je poursuis ma route encore vers Issigéac ; c’est impossible d’aller plus loin, je dois trouver un endroit pour dormir un moment. Je n’ai aucun lieu qui puisse me convenir. Je me dirige alors vers la poste. Il y a un préau pour abriter les voitures en stationnement ; je trouve aussi un banc :
« Voilà ton lit pour ce soir, mon gars ! »
J'installe mon casque en guise d’oreiller et je défais ma couverture de survie. Je me protège comme je peux, mais le vent s’infiltre, j’ai du mal à m’endormir, mais la fatigue est trop forte, je ne peux résister plus longtemps. J’entends bien des personnes qui passent près de moi, un chien vient aussi, heureusement sans agressivité ; une heure plus tard, je tremble de partout. La décision est prise : en route vers Bergerac.

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